Opérer dans un cadre multinational
Pour comprendre le cadre multinational d'engagement de l'armée de Terre dans les opérations extérieures, notamment depuis les années 1990, il est d'abord nécessaire de rappeler que la coopération militaire sous l'égide du politique a préexisté au multilatéralisme qui s'est développé au XXe siècle.
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Opérer dans un cadre multinationalDans le cadre de cette fiche, nous ne remonterons pas au delà du tournant du Moyen Âge et de l'époque moderne..., au moment où se constituent pleinement les États modernes associant un territoire, des institutions, et notamment une armée, ainsi que la conscience d'une unité politique et culturelle : la nation. Les traités de Westphalie (1648) donnèrent naissance à un premier système multinational qui garantissait la souveraineté exclusive des États sur leur territoire et leur population, ainsi que le principe d'équilibre des puissances au nom duquel des États pouvaient s'allier pour contrer la montée en puissance de l'un de leurs partenaires, laquelle était considérée comme un facteur de déséquilibre. C'est ainsi que le XVIIIe siècle fut celui des alliances et de leurs recompositions régulières, au début de la guerre de Sept ans (1756-1763) par exemple qui vit s'affronter la France, l'Autriche, la Russie, la Saxe, la Suède, l'Espagne d'une part, et la Grande-Bretagne, la Prusse et le Hanovre d'autre part. L'alliance entre la France et l'Autriche, adversaires jusqu'alors, fut scellée par le premier traité de Versailles en 1756. En 1814, le traité de Chaumont unit la Prusse, l'Autriche, la Russie et la Grande-Bretagne contre la France impériale que ces États voulaient réduire à ses frontières de 1792 (soit avant le déclenchement de la guerre opposant la France révolutionnaire aux autres puissances européennes). À la fin du XIXe siècle, la mise en place de la Triple-Alliance (1882 : Allemagne, Autriche, Italie) et de la Triple-Entente (alliance non formalisée par un traité : Grande-Bretagne, France, Russie) joua un rôle dans l'extension des tensions de l'été 1914 à l'ensemble du continent. Ainsi, depuis plus de trois siècles, les États, en Europe, ont l'habitude d'unir leurs forces dans des opérations militaires visant des intérêts communs. Toutefois, ces alliances mouvantes ne se traduisaient pas jusqu'alors par la création d'institutions permanentes et n'induisaient pas de transfert de commandement sous une autorité supérieure, ni même de délégation de commandement à l'un des alliés.
C’est au XXe siècle qu’émerge la notion de multilatéralisme, qui fait l'objet de nombreuses recherches dans le champ des relations internationales. Définie comme étant « l'attitude qui privilégie le règlement multilatéral des problèmes mondiaux, dans un esprit de coopération internationale et de compromis », elle ne témoigne plus uniquement de la volonté de préserver l'équilibre des puissances, mais aussi de la recherche d'un cadre d'action, notamment diplomatique et militaire, capable d'assurer la stabilité et la prévisibilité du système international afin de préserver la sécurité et de permettre la prospérité. En ce sens, il est symbolisé, entre autres, par le projet en 14 points du président des États-Unis Woodrow Wilson, à l'origine de la Société des Nations créée en 1919. Cette SDN, considérée comme un échec puisqu'elle n'est pas parvenue à empêcher la montée des régimes autoritaires et totalitaires ni le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, ne prévoyait toutefois pas la création d'un instrument militaire, favorisant plutôt les solutions diplomatiques en cas de tensions ou de conflits. Il faut attendre la naissance de l'Organisation des Nations Unies le 26 juin 1945 pour qu'une organisation internationale se dote des moyens opérationnels de garantir la paix. Si l'expression complète du multilatéralisme onusien a été entravée durant la Guerre Froide en raison de l'opposition entre les deux Grands, elle s'est renforcée depuis les années 1990 avec l'augmentation et la complexification des opérations de maintien de la paix.
Depuis 1945, d'autres structures sont apparues, dans le cadre desquelles l'armée de Terre française a été employée à de nombreuses reprises : l'OTAN (créée en 1949 dans le contexte de la mise en place des blocs et de la doctrine américaine du containment, elle n'a pas disparu avec la fin des tensions qui avaient entraîné sa naissance, mais a au contraire étendu le champ de ses interventions) et l'Europe de la défense (à travers la PESD décidée par le Traité de Saint-Malo en 1998, devenue la PSDC à la suite du traité de Lisbonne en 2009).
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